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Autour de Colmar, une bio florissante

Autour de Colmar, une bio florissante

Le 10/12/2024

Au pays des cigognes, les noms de village résonnent comme des hauts lieux touristiques, avec la route des vins qui serpente entre les coteaux et les marchés de Noël qui illuminent l’hiver. La bio, enracinée depuis longtemps, du producteur au consommateur, s’y est bien épanouie, merci ! - Pascale Solana

Du printemps à l’automne, de l’ail des ours aux fruits de l’églantier, Mathias Tschudy suit le temps des plantes qu’il cultive ou cueille dans la montagne près d’Aubure. Dans son atelier, l’Herberie, paysanne, avec un soin et une délicatesse étonnante, il en fait des tisanes, des sirops et des vinaigres parfumés.

Au pays des cigognes, les noms de village résonnent comme des hauts lieux touristiques, avec la route des vins qui serpente entre les coteaux et les marchés de Noël qui illuminent l’hiver. La bio, enracinée depuis longtemps, du producteur au consommateur, s’y est bien épanouie, merci !

Pascale Solana

Aurélie Capraro

Cogérante du magasin Biocoop Les Erlen au sud de Colmar (Haut-Rhin)

Il ne faudrait pas croire qu’en Alsace on mange du munster et de la choucroute arrosés de vin blanc à tous les repas », s’exclame Aurélie Capraro, cogérante avec Camille Boutillot de Biocoop Les Erlen, quand elle évoque les producteurs locaux avec lesquels elles travaillent. Une soixantaine dont les portraits en grand et encadrés sont affichés sur les murs du magasin qui a vu le jour il y a cinq ans, aux portes de Colmar. « Ici, c’est facile », reconnaît-elle en énumérant un, deux, trois, quatre, cinq boulangers bio ! « À l’image de l’agriculture alsacienne, celle du Haut-Rhin est particulièrement diversifiée. Et en bio, on peut tout faire », assure Hélène Clerc, chargée de mission à l’antenne Alsace de Bio en Grand Est.

Aurélie Capraro. © Solana.
Une partie de l’équipe de Biocoop Les Erlen, avec, de gauche à droite, Maxime Fradet et Melina Danesch, agenouillés, puis Thomas Constantino, Cédric Legrand, Thomas Struss, Ludivine Benente et Aurélie Capraro.

Paysage ordonné

Sur une carte, du nord au sud, d’ouest en est, se dessinent d’abord une bande de montagnes douces, la fameuse ligne bleue des Vosges, puis une autre bande, les coteaux, suivie d’une dernière, la plaine, juste avant la frontière allemande au-delà de laquelle le paysage se réplique presque, en miroir. Et au milieu coule une rivière, l’Ill, et bien sûr un fleuve, le Rhin. C’est un paysage bien rangé : les forêts de sapins et de feuillus, puis les prés et les vaches. Sur le piémont, les vignes montées sur fil dans lesquelles se lovent des villages coquets et les entrées de vallées vers « la France de l’intérieur » à l’ouest. Et enfin, le maraîchage et les grandes cultures, surtout celle du maïs, roi qui pompe l’or du Rhin, disputant la riche plaine à la végétation indomptée des prés inondables, le Ried. L’Alsace bénéficie de sols et de conditions climatiques divers, d’où la variété de productions et sans doute la gastronomie réputée, dont les fermes auberges et autres « winstubs » (tavernes typiques) sont les étendards. 

Le nord du Haut-Rhin, « dynamique et motivé pour la bio » selon Hélène Clerc, compte beaucoup de producteurs. Les surfaces bio représentent 9,9 % (Agence bio, 2023). « La taille des exploitations alsaciennes en général est plus petite qu’ailleurs », poursuit-elle. 15,7 % des fermes sont bio, soit plus que la moyenne alsacienne (14,2 %) et française (14,4 %). Et là encore, de la variété dans les circuits : transformation et vente directe à la ferme, sur les marchés ou dans les points de vente nombreux, ou bien filières longues, notamment en élevage laitier, souvent en coopérative. Ces dernières ont eu leur rôle dans la conversion de certaines vallées, comme autour de Lapoutroie dont les nombreux éleveurs sont pour la plupart en bio. 

Devant l’élevage, la viticulture « locomotive » est l’activité agricole bio dominante comme dans toute l’Alsace : plus de la moitié des exploitations bio font du vin. Ainsi, 20 % du vignoble haut-rhinois est bio, modifiant par petites touches le paysage : retour de l’herbe, parfois des arbres, des haies ou encore des murets, îlots de vie qu’on redécouvre.

La Ferme sur le Mont de Jean-Bernard Perrin, une des nombreuses exploitations laitières bio qui caractérisent la verte vallée de Lapoutroie. © Solana.
Jean-Bernard Perrin.

Tome, Munster and co

Jean-Bernard Perrin.

Impossible d’ignorer le munster. D’ailleurs, il trône au rayon traiteur du magasin Biocoop Les Erlen avec d’autres produits locaux. A la Ferme sur le Mont au-dessus de Lapoutroie, Jean-Bernard Perrin et son troupeau, des vosgiennes croisées montbéliardes et simmental, solides montagnardes, produisent toute l’année des tomes, du munster et des yaourts. Les vaches vivent la majeure partie du temps dans les prés pentus au-dessus de Lapoutroie, où les fermes bovines laitières et bio sont nombreuses. Lui se souvient qu’il a toujours été attiré par le métier, d’abord ouvrier agricole, puis exploitant. Jusqu’à ce que répandre des engrais dans les prairies, donner du lait en poudre aux veaux, il trouve cela aberrant. Et coûteux. En 1999, il opte pour le bon sens économique et écologique. Il vire au bio, stoppe les engrais, revient à la prairie naturelle enrichie désormais de compost – « rare », dit-il, précisant que « le bio, c’est hypertechnique ! » –,préfère le taureau à l’insémination… Aux coopératives laitières du coin, il tourne le dos pour aller au bout de son désir d’indépendance et apprend à faire du fromage et des yaourts. « Il faut quinze à vingt et un jours pour obtenir un munster, un fromage à pâte molle et à croûte lavée, retourné tous les deux jours et frotté à l’eau », explique l’agriculteur heureux, malgré la charge de travail, de sa quasi-autonomie, illustrée par les installations de la laiterie chauffée avec son propre bois. À présent, il songe à faire rouler ses tracteurs grâce au photovoltaïque… « En 1987, j’avais 21 vaches. Aujourd’hui, 21 sur 75 hectares ! Je ne cherche pas à produire plus, je vise l’équilibre. Oui, assure-t-il, une petite ferme, c’est viable ! »

La fibre écolo

Le consommateur est lui aussi de ce dynamisme, auquel s’ajoute le tourisme aimanté par la route des vins et la Venise d’Alsace, « Colmar [qui] a une forte conscience bio », résume Aurélie Capraro. Et de citer la foire Éco Bio, créée en 1982. Parmi les plus importantes manifestations bio de France, elle a quitté Rouffach pour pouvoir s’étaler à Colmar.

Cette « conscience » ne date pas d’hier. La pollution des nappes phréatiques liée à l’extraction de la potasse au début du siècle dernier, « l’or rose » utilisé notamment dans les engrais, a peut-être donné l’impulsion du souci de la nature. À moins que ce ne soit les combats d’Alsace Nature, association fédérative fondée dans les années 1960. Ou bien, plus tard, le nucléaire qu’incarne la centrale de Fessenheim, définitivement à l’arrêt. Ou la proximité de l’Allemagne, réputée verte, et ses premiers grossistes bio dans les années 1980 ? Ou celle de la Suisse, où Rudolf Steiner, père de l’agriculture biodynamique, dispensa son fameux cours aux agriculteurs ? C’était près de Bâle, en 1924. Le MABD, Mouvement d’agriculture biodynamique, source d’inspiration et de formations, siège à Colmar.

En terres welches

Frédérique Giovanni.

Au cœur des montagnes aux pentes douces se niche le pays welche, petit territoire rural et forestier de langue et de culture romane. Alsacien et vosgien ! Avec des noms de village non germanophones, Labaroche, Aubure ou Lapoutroie où s’est installée, en 1972, la ferme du Bambois, première chèvrerie bio d’Alsace. Au pays du munster, le chèvre n’était pas dans les codes : « Une idée hippie à laquelle la Chambre d’agriculture ne croyait pas ! », raconte Frédérique Giovanni. Mais le caprin a tenu bon, et même inspiré. « Région frontalière, l’Alsace est très ouverte, il y a beaucoup de passage, de surfaces de vente bio, et les habitudes ont évolué. » Les fromages, des palets blancs décorés des cueillettes multicolores de la chevrière, valent le détour, et sa conception de la fabrication est singulière : des pots à lait, à l’ancienne, plutôt que les tanks réfrigérés qui rendent dépendant du fournisseur d’énergie. Tous les jours, une fois le lait caillé, il est moulé à la louche pour une texture qu’on veut « parfaite ». Le troupeau « petit », selon la chevrière, compte 70 alpines. Autant que peuvent nourrir les 35 hectares de landes et de pâtures de la ferme du Bambois qui prône « l’équilibre plutôt que l’agrandissement. De toute façon ici, l’accès au foncier est compliqué car il y a beaucoup d’éleveurs, preuve d’une agriculture paysanne vivante ».

Frédérique Giovanni.

Et hopla* bio !

Dans ce berceau de pionniers, les deuxième ou troisième générations ont pris la relève (lire ci-contre), et tout est là pour continuer à fleurir. Mais on n’oublie pas ce petit recul des surfaces bio : « Moins 875 hectares en 2023 dans le Haut-Rhin. Du jamais vu ! », note Hélène Clerc. Pas de conversion non plus l’an dernier, des installations mais qui « s’orientent plutôt sur du maraîchage et des petites surfaces ». L’enjeu du département reste la structuration des filières : orge, malt, houblon, et aussi des brasseries et des malteries comme dans le projet Maltala. La problématique de l’eau et ses promesses technologiques (sondes…) est aussi dans les débats. « Les bio y prêtent l’oreille bien sûr, mais leur premier levier d’action pour stocker la ressource est la protection des écosystèmes qui le font naturellement, explique Hélène Clerc. Chaque commune qui soutient un projet bio sauvegarde l’eau potable ! » –

* Mot qui résume plein d’expressions chez les Alsaciens !

ÇA C'EST BIOCOOP

Famille Koehly. © Solana.

Tous bio !

Famille Koehly.

Au 14, Schneckenackerweg (chemin de l’escargot en alsacien), à 10 min à pied du centre-ville, autant du magasin Biocoop Les Erlen, les Koehly ont pris racine. Hier les premiers bio et aujourd’hui les derniers maraîchers dans la ville, sur ces terres nourricières qu’aspire l’ogre urbain. Qui ne les connaît pas ?  

Leur histoire maraîchère commence avec Joseph, un charretier colmarien qui prend le goût de la culture et qui, dans les années 1950, va commercialiser les productions de son terrain. Puis viendra Eugène, « amoureux de la nature », se souvient Thierry, le petit-fils à droite sur la photo, en ajoutant : « Moi, la conversion, connais pas. Je suis né dans la bio ! » Avec Rachel son épouse, il a pris le relais il y a déjà un bon moment. Et maintenant Tristan (au centre), Jessie, Sébastien et Nathanaël, les quatre arrière-petits-fils, sont avec eux. Hormis l’asperge et le chou à choucroute, petite filière spécifique, ils produisent tous les légumes selon le cahier des charges bio Nature & Progrès. « Tout ce qu’on peut produire en Alsace et toute l’année », s’exclame, jovial, Thierry Koehly au milieu du champ qu’ils ont choisi pour la photo. Ses poireaux bleutés qui cisèlent le brun de la terre, avec au loin le vert des vignes coiffées des sommets sombres, sont superbes, bien à l’alignement. « Si ce n’est pas droit, on n’hésite pas à reprendre le rang pour pouvoir désherber correctement ensuite. » Reprendre, comment ça ? « Installé à l’arrière du tracteur qui avance, on replace les poireaux en terre, un à un, à la main évidemment », éclate de rire Rachel Koehly. Nous, on aime quand c’est propre et bien fait ! »

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